Ghost of Yōtei : comment Sucker Punch a honoré la culture aïnoue avec respect et immersion

Publié le 20 juin 2025 à 14:07

Dans un article passionnant publié sur le PlayStation Blog, le studio américain Sucker Punch, créateur de Ghost of Tsushima, lève le voile sur les coulisses culturelles de leur nouveau projet : Ghost of Yōtei. Loin de se contenter de références vagues ou de clichés visuels, le studio raconte comment il a cherché à représenter la culture aïnoue avec une extrême attention et un profond respect.

Alors que Ghost of Tsushima s’inspirait déjà du Japon féodal, ce nouveau volet place son intrigue dans l’île d’Hokkaido, avec un focus particulier sur la culture des Aïnous, peuple autochtone du nord du Japon. Une démarche qui aurait pu virer à l’appropriation si elle n’avait pas été aussi documentée, vécue et guidée par des experts locaux.

Sucker Punch ne cache rien : ils ne sont pas Japonais, encore moins Aïnous. Conscients de leurs limites, ils expliquent avoir cherché des conseils culturels dès le départ. Pour Ghost of Tsushima, l’aide était venue des équipes PlayStation à Tokyo. Pour Ghost of Yōtei, le champ des conseillers a été élargi, notamment avec une collaboratrice aïnoue.

Et cette rencontre n’est pas restée théorique. Le studio raconte un moment-clé : une sortie en nature, en compagnie de cette conseillère et de sa famille. Pas de notes, pas de photos, juste de l'écoute, des mains dans la terre, la cueillette de légumes sauvages… Une immersion sincère, durant laquelle l’équipe s’est reconnectée à la terre. Cette expérience a d’ailleurs inspiré une mécanique de gameplay autour de la cueillette, pour que les joueurs puissent ressentir un écho de cette connexion à la nature.

Le studio a ensuite visité le musée de la culture aïnoue de Nibutani, guidé par la même conseillère. Ce fut une immersion dans les objets du quotidien, les tissus, les outils, mais aussi leurs usages, leurs histoires. Tous ces éléments sont maintenant présents dans le jeu — non pas comme une décoration exotique, mais comme des fragments de vie culturelle authentique, intégrés au gameplay, à l’univers narratif, et à l’environnement.

Autre point clé : l’équipe a aussi parcouru la péninsule d’Oshima, une région historiquement marquée par la présence du clan Matsumae, seul clan japonais autorisé à commercer avec les Aïnous à l’époque Edo. Ils ont ainsi découvert l’influence japonaise sur cette terre originellement aïnoue, notamment les cerisiers, rares sur l’île mais omniprésents dans cette zone colonisée.

Le jeu rend compte de ce contraste entre nature sauvage et zones plus “japonisées”, ce qui renforce le sentiment de frontière culturelle et géographique au cœur du jeu.

Enfin, pour parfaire leur connaissance du Japon d’époque, l’équipe s’est rendue sur Honshu avec leur producteur japonais Ryuhei Katami, dans une véritable “classe itinérante” sur la culture Edo.

Moment fort du périple : la visite du sanctuaire Nikkō Tōshō-gū, dédié à Tokugawa Ieyasu, fondateur du shogunat Edo. Sur place, l’équipe a demandé une bénédiction pour leur jeu. Ils ont reçu un omamori (amulette) et un ema (plaque de vœux), qu’ils gardent aujourd’hui au studio, exposés sur une étagère tournée vers le sud — comme un symbole de respect, d’inspiration et de gratitude.

Sucker Punch est très clair : Ghost of Yōtei n’est pas une reconstitution historique exacte. Il s’agit d’un monde fictionnel, librement inspiré de l’Hokkaido du XVIIe siècle. Mais tout l’effort de l’équipe consiste à ancrer cette fiction dans des ressentis réels, des expériences vécues, des éléments authentiques.

Les paysages, les objets, les traditions et même les tensions culturelles sont retranscrits avec une humilité rare pour un studio occidental. À l’heure où de nombreux jeux se contentent de “piller” des cultures pour créer du spectacle, Sucker Punch fait ici figure d’exception vertueuse.

Loin d’un simple skin d’univers ou d’une carte postale du folklore, Ghost of Yōtei semble vouloir offrir une vraie rencontre entre cultures, à travers un média interactif. Et cela commence dès la production : par le voyage, l’écoute, le silence, la main tendue.

En documentant leur démarche, Sucker Punch trace un exemple de comment représenter “l’autre” sans trahison ni effacement, mais avec respect, partage et curiosité sincère.

 

Source : https://blog.fr.playstation.com/2025/06/18/lecons-de-culture-pour-ghost-of-yotei/ 

 


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