
Depuis plusieurs mois, une voix monte parmi les passionnés de jeux vidéo : le mouvement Stop Killing Games, initié par le créateur Ross Scott, dénonce la disparition croissante des jeux vidéo en ligne, fermés définitivement par leurs éditeurs. Ce mouvement citoyen dénonce une industrie qui "efface" des œuvres, parfois à peine quelques années après leur sortie, privant les joueurs d’accès à des produits pourtant achetés légalement.
Face à cette mobilisation croissante, le lobby Video Games Europe – qui représente la quasi-totalité des grands acteurs de l'industrie, de Nintendo à Ubisoft, en passant par Take-Two, Warner Bros. et bien d'autres – a publiquement réagi pour la première fois. Si la déclaration reconnaît en partie la frustration des joueurs, elle défend fermement le droit des éditeurs à fermer leurs jeux pour des raisons économiques ou techniques.
L’idée de base du mouvement Stop Killing Games est simple : lorsque des éditeurs ferment des jeux en ligne (multijoueur ou connectés), les joueurs perdent tout accès à ces titres, parfois sans alternative hors ligne, malgré l’achat initial.
Face à cette mobilisation, Video Games Europe reconnaît d’emblée que le problème est réel :
« Nous apprécions la passion de notre communauté. Cependant, la décision d’interrompre les services en ligne est complexe et ne doit jamais être prise à la légère. »
Le lobby insiste sur le fait que ces décisions sont légalement encadrées, et affirme que les joueurs sont généralement informés à l’avance, conformément aux règles de protection des consommateurs.
L’argument principal mis en avant est celui de la viabilité commerciale. Les éditeurs expliquent que maintenir un jeu en ligne actif, avec des serveurs et un support technique, représente un coût continu, difficile à justifier pour des titres qui ne rapportent plus suffisamment.
« Elle doit être une option pour les entreprises lorsqu’une expérience en ligne n’est plus commercialement viable. »
En d’autres termes : si le jeu ne génère plus de revenus, il peut légitimement être abandonné. Le lobby refuse également l’idée que les éditeurs devraient être contraints de proposer des alternatives hors ligne, évoquant des problèmes techniques, budgétaires… et juridiques.
Une partie du communiqué se concentre sur les risques liés aux serveurs privés ou à la rétro-ingénierie :
« Les protections que nous avons mises en place pour sécuriser les données des joueurs, supprimer les contenus illégaux et lutter contre les contenus communautaires dangereux n’existeraient pas [dans ces alternatives] et laisseraient les détenteurs de droits responsables. »
Selon Video Games Europe, forcer les studios à maintenir ou recréer des versions hors-ligne des jeux serait trop coûteux, voire dangereux pour les marques concernées, notamment en matière de protection des données ou de modération de contenu. Un argument qui vise directement certaines propositions de Stop Killing Games, qui appelle à des solutions de conservation numériques via des patchs, ou à l’ouverture des serveurs aux communautés.
Pour Ross Scott et les soutiens du mouvement, cette réponse est insuffisante. Le fondateur de Stop Killing Games a déjà promis une réponse publique, contestant l’idée que les fermetures soient inévitables ou sans alternative. Selon lui, des solutions techniques et communautaires existent, et doivent être soutenues légalement.
Le débat prend d’ailleurs une tournure plus institutionnelle. Si la pétition liée au mouvement atteint un million de signatures valides, elle pourrait arriver devant le Conseil européen, ce qui forcerait les institutions à se pencher officiellement sur la durabilité et la conservation des jeux numériques.
En conclusion : Le communiqué de Video Games Europe marque une étape importante : l’industrie prend au sérieux la contestation portée par Stop Killing Games. Toutefois, son positionnement reste défensif et économique, sans propositions concrètes pour préserver les jeux à long terme.
Face à cela, les joueurs, archivistes, développeurs indépendants et défenseurs du patrimoine vidéoludique continuent leur combat. Car derrière chaque fermeture, ce n’est pas qu’un jeu qui disparaît : c’est une œuvre, une communauté, et parfois un souvenir personnel.
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