
Glen Schofield n’est pas un nom que l’on prononce à la légère dans le monde du jeu vidéo. À l’origine de franchises iconiques comme Dead Space et plus récemment The Callisto Protocol, ce vétéran de l’industrie a toujours été une voix singulière et ambitieuse, particulièrement dans le genre de l’horreur. Mais dans un post LinkedIn empreint d’émotion et de lucidité, il annonce peut-être la fin de son aventure dans le jeu vidéo en tant que créateur actif.
L’histoire commence pourtant avec une étincelle : une idée originale soufflée par sa fille Nicole, elle-même développeuse forte de huit ans d’expérience. Enthousiasmé par le concept – qu’il décrit comme « un nouveau sous-genre de l’horreur », une approche innovante et jamais vue selon ses mots – Schofield décide de se lancer dans cette nouvelle aventure.
« Ce n'était pas seulement de l'horreur, mais quelque chose de plus. »
Il monte une petite équipe de six personnes aux États-Unis, renforcée par une autre au Royaume-Uni, et construit un prototype convaincant. Le budget est volontairement restreint à 17 millions de dollars, un chiffre très raisonnable pour une production ambitieuse mais ciblée.
Malgré un prototype solide et un concept salué lors des présentations, la dure réalité de l’industrie le rattrape. Les investisseurs, d’abord intrigués, reculent au moment de passer à l’action.
« Nous avons eu de nombreuses réunions, même des troisièmes réunions. Mais les retours étaient : ‘atteignez les 10 millions de dollars’. Puis, dernièrement, ce chiffre est tombé à 2-5 millions. »
Face à cet effritement de la confiance financière, l’équipe prend une décision difficile : mettre un terme au projet. L’idée, aussi originale soit-elle, ne trouve pas de soutien économique suffisant dans une industrie toujours plus frileuse et avide de formules éprouvées.
Derrière ce retrait se cache une désillusion profonde. Schofield admet que le développement de jeux AAA semble désormais « loin » pour lui, tant les conditions actuelles rendent la création indépendante quasiment impraticable sans le soutien massif d’éditeurs ou d’investisseurs.
« Tout me manque : l'équipe, le chaos, la joie de construire quelque chose pour les fans. »
Malgré cela, il ne tourne pas complètement la page. Il continue d’écrire, de créer, de conceptualiser. Mais il envisage sérieusement que ce dernier projet, jamais publié, pourrait marquer la fin de sa carrière en tant que réalisateur de jeux.
Dans son message, Schofield rend aussi hommage aux talents qui l’ont accompagné dans cette tentative. Il les recommande chaudement à tous ceux qui recrutent, preuve d’une solidarité humaine rare dans une industrie souvent impitoyable.
Il lance enfin un message d’alerte déguisé à l’industrie : celle-ci semble aujourd’hui incapable ou peu désireuse de soutenir des projets audacieux, même portés par des vétérans au palmarès respecté.
Le cas Glen Schofield est symptomatique d’un problème plus large : la difficulté croissante à faire émerger des concepts originaux dans un monde vidéoludique dominé par les suites, les reboots et les formules « safe ». Même les créateurs les plus reconnus peinent à convaincre sans appui marketing massif ou licence déjà installée.
Et si l’on en croit les mots du principal concerné, l’originalité seule ne suffit plus à convaincre.
Schofield conclut son message avec une sincérité désarmante :
« Peut-être ai-je réalisé mon dernier jeu. Qui sait ? Si c’est le cas, merci d’avoir joué à mes jeux. »
Un au revoir plein de dignité, loin du cynisme, mais porteur d’une question lourde de sens : à quoi bon innover si plus personne n’est prêt à financer la nouveauté ?
Pour les fans de Dead Space, de The Callisto Protocol, ou simplement de jeux d’horreur ambitieux et soignés, cette nouvelle résonne comme un coup dur, mais aussi comme un moment de réflexion sur la direction que prend l’industrie.
Si Schofield ne revient jamais avec un nouveau jeu, son empreinte sur le média restera indélébile. Et s’il revient, ce sera peut-être d’une autre manière : plus libre, plus créatif, mais hors du système classique.
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