Hideo Kojima tire à balles réelles sur l'industrie du jeu vidéo — lassitude, indépendance et rêves spatiaux

Publié le 2 août 2025 à 13:58

Toujours aussi franc et singulier, Hideo Kojima, figure emblématique du jeu vidéo, s’est récemment livré dans une interview accordée au détaillant de mode canadien SSENSE. À cette occasion, il a partagé sans détour ses frustrations concernant l’état de l’industrie vidéoludique actuelle, son désintérêt croissant pour les blockbusters, son admiration pour les jeux indépendants, et… son ambition folle de créer un jeu depuis l’espace.

Lorsqu’on lui demande son avis sur les jeux présentés lors du Summer Game Fest, Kojima ne cache pas sa déception.
Selon lui, l’événement était rempli de clones : des titres dans lesquels on affronte soit un extraterrestre, soit un monstre médiéval, avec les mêmes visuels et les mêmes systèmes de jeu.

« Beaucoup de gens aiment ça, je le comprends », dit-il. « Mais il est important d’y apporter quelque chose de vraiment nouveau. »

En clair : l’industrie AAA tourne en rond, recyclant les mêmes recettes sans prise de risque. Une critique qui, venant du créateur de Metal Gear et Death Stranding, a de quoi faire du bruit.

 

Kojima va encore plus loin en avouant qu’il ne joue presque plus à des jeux à gros budget, qu’il juge « sûrs et ennuyeux ».
Ce sont les jeux indépendants, dit-il, qui portent aujourd’hui les idées les plus fraîches et les innovations les plus audacieuses.

Ce positionnement n’est pas nouveau chez Kojima, qui a toujours cultivé une image d’auteur libre et avant-gardiste, mais il confirme ici une rupture croissante avec l'industrie mainstream qu’il juge trop frileuse.

 

Lorsqu’on lui demande s’il jouera au très attendu remake de Metal Gear Solid 3: Snake Eater produit par Konami (sans lui), Kojima répond par un rire ironique, suivi d’un "Non, je ne le ferai pas."

Une réponse sèche, mais révélatrice du fossé entre l’homme et son ancienne maison d’édition, depuis leur séparation houleuse en 2015.
Pour Kojima, regarder d’autres reprendre son œuvre n’a visiblement aucun attrait personnel, ni artistique.

 

Dans un autre moment marquant de l’interview, Kojima évoque une visite dans un studio de renom (non nommé), où il a été invité à donner son avis sur un jeu d’infiltration en développement. Il en est reparti… déçu :

« Les créateurs de jeux militaires ne savent probablement pas démonter une arme ni tirer. C’est un peu triste. »

Interrogé sur ses propres compétences, il affirme avec aplomb :

« Oui, je sais démonter une arme. J’ai reçu un entraînement pour ça, et appris différentes façons de tuer. »

Une déclaration volontairement provocante, mais aussi symbolique : Kojima se veut crédible, documenté, enraciné dans le réel, là où d’autres ne font, selon lui, que simuler à la surface.

 

Et parce qu’il ne serait pas Hideo Kojima sans une touche de mégalomanie poétique, le créateur japonais a aussi confié, plus tôt ce mois-ci lors du Festival du film de Sydney, qu’il ambitionne de créer un jeu vidéo… depuis l’espace.

« Je veux m’entraîner correctement, apprendre à amarrer un vaisseau spatial, aller à la Station Spatiale Internationale et y rester quelques mois », explique-t-il.
« Je ne suis pas scientifique, mais je pourrais probablement créer des jeux dans l’espace. Je veux être le premier. »

Il note même que des astronautes de plus de 60 ans ont déjà été envoyés, laissant penser que ce rêve fou pourrait ne pas être si irréalisable.
L’espace ne serait alors qu’un nouveau terrain d’exploration créative, à la mesure de son imaginaire.

 

Entre critiques acerbes et ambitions interstellaires, Hideo Kojima montre qu’il reste un créateur radicalement libre, prêt à bousculer les normes d’une industrie qu’il juge stagnante.
Il ne cherche plus à plaire au plus grand nombre, mais à faire ce que personne d’autre n’ose faire — quitte à le faire depuis l’orbite terrestre.


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