Dans un échange rare et profondément transparent, Shuhei Yoshida, figure emblématique de PlayStation et ancien président de Worldwide Studios, s’est confié dans le podcast My Perfect Console.
L’entretien, relayé par VGC, révèle les coulisses parfois brutales du développement vidéoludique : des projets ambitieux annulés, des millions investis avant d’être abandonnés, et les dilemmes humains qui accompagnent les décisions les plus lourdes.
Ces révélations lèvent le voile sur un aspect méconnu de l’industrie : toutes les grandes productions ne voient pas le jour, même après des années de travail, même après des investissements colossaux. Et parfois, ce sont des projets porteurs de concepts incroyables qui finissent dans les archives.
L’un des moments les plus marquants du témoignage de Yoshida concerne un projet interne du studio Santa Monica, connu pour la saga God of War.
Il confirme d’abord que ce jeu n’était pas un nouvel épisode de God of War, mais une nouvelle licence, portée par une « idée vraiment incroyable » et des mécaniques de gameplay très originales.
Ce projet a bénéficié d’un soutien prolongé au fil des années. Après un investissement atteignant 25 millions de dollars, les équipes ont fini par venir elles-mêmes annoncer à Yoshida :
« Nous devons arrêter. »
L’ancien patron reconnaît ne plus se souvenir précisément de la raison de cette décision, mais souligne deux points essentiels :
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le concept était excellent,
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le gameplay, lui, n’est jamais parvenu à fonctionner.
Un constat dur, mais typique de l’industrie : certaines visions ne parviennent tout simplement jamais à se concrétiser.
Yoshida rappelle que de nombreuses annulations sont normales et prévisibles dans la phase préliminaire d’un développement.
Le processus habituel :
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Une idée est testée.
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Un prototype est créé.
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Si l’essai est concluant, on continue.
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Sinon, on retravaille… ou on abandonne.
Dans cette phase, abandonner un projet est peu coûteux et presque routinier.
Mais les annulations les plus douloureuses sont celles qui surviennent tardivement, après de grands investissements, de grandes ambitions… et beaucoup d’espoir.
Yoshida révèle également l’existence d'un autre jeu d’envergure similaire, annulé lorsqu’il a pris la direction de Worldwide Studios.
Dans cette période, il supervisait une multitude de projets issus d’équipes emblématiques :
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London Studio,
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EyeToy,
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Media Molecule,
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PSVR,
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Guerrilla Games, etc.
Parmi tous ces projets, un titre à gros budget semblait manquer d’un élément fondamental : un concept suffisamment clair et solide.
Sans direction créative forte, le projet ne pouvait pas atteindre le niveau d’exigence de PlayStation. Il a donc été annulé — une décision difficile et lourde de conséquences.
Yoshida précise que ces deux annulations comptent parmi les plus importantes de sa carrière…
…mais nuance en ajoutant qu’aujourd’hui, une annulation à 25 millions n’a rien d'exceptionnel.
Il existe des échecs encore plus coûteux dans l’industrie moderne.
Shuhei Yoshida insiste sur un aspect trop souvent oublié :
« Annuler un jeu, c’est difficile, même lorsqu’on sait que c’est la bonne décision. »
Les équipes peuvent espérer une renaissance miracle du projet, un changement de direction, un sursaut de créativité.
Mais la réalité est implacable :
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plus le projet traîne,
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plus les pertes s’accumulent,
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plus les développeurs se fatiguent et perdent leur motivation.
C’est pourquoi Yoshida met un point d'honneur à communiquer clairement, afin d'éviter que les équipes ne s'enlisent dans une impasse créative.
Sa philosophie est simple :
« Faisons quelque chose de différent. De nouveau. De totalement inédit. Repartons de zéro. »
Un témoignage rare sur les coulisses de PlayStation
Les confidences de Yoshida offrent un aperçu précieux de la complexité derrière chaque jeu vidéo : chaque idée révolutionnaire peut devenir un chef-d’œuvre… ou disparaître après des millions investis.
Au-delà des chiffres, ces annulations montrent qu’une grande innovation ne garantit pas un grand jeu. Et qu’au sein de PlayStation, les décisions artistiques et économiques s'entremêlent constamment pour définir l’avenir de la marque.
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