Le fonds saoudien PIF s’apprête à contrôler 93,4 % de Electronic Arts (EA) — une acquisition record qui redessine l’avenir du géant du jeu vidéo

Publié le 6 décembre 2025 à 12:00

Depuis l’annonce en septembre 2025, l’acquisition de Electronic Arts (EA) par un consortium mené par le fonds souverain saoudien Public Investment Fund (PIF) suscite de nombreuses interrogations. Les derniers documents réglementaires rendus publics révèlent aujourd’hui l’ampleur exacte de l’opération : si le rachat est finalisé, le PIF détiendra 93,4 % des parts d’EA, reléguant les autres investisseurs à des positions largement minoritaires.

L’opération est — selon toute vraisemblance — le plus important leveraged buyout (rachat par effet de levier) jamais réalisé dans le secteur. Le consortium acquéreur, qui inclut également les firmes d’investissement Silver Lake et Affinity Partners (liée à Jared Kushner), prévoit d’acheter 100 % du capital d’EA. Le prix fixé : 55 milliards de dollars, dont environ 36,4 milliards d’équité et 20 milliards de dette.

Pour atteindre son contrôle de 93,4 %, le PIF devra injecter près de 29 milliards de dollars de nouveaux capitaux — en plus de ses 9,9 % déjà possédés. Les 5,5 % restants reviendraient à Silver Lake, et 1,1 % à Affinity Partners.

Suite à cette acquisition, EA sortira des marchés publics, n’étant plus cotée en bourse. Le conseil d'administration a déjà approuvé le deal, sous réserve des autorisations réglementaires habituelles.

Malgré le pouvoir acquis par le PIF, les communiqués officiels assurent qu’EA conservera son “contrôle créatif total”, et que les équipes de développement continueront d’opérer sans ingérence directe des nouveaux actionnaires, du moins en théorie.

Le plan, selon EA et le consortium, est « d'accélérer l’innovation, d’étendre la portée mondiale » de l’entreprise, et de lui donner plus de flexibilité hors des contraintes de la bourse — des arguments typiques en faveur de tels rachats.

Le rachat d’EA par le PIF s’inscrit dans une stratégie plus large de diversification de ses investissements dans le jeu vidéo et le divertissement. Le fonds a déjà acquis des participations importantes dans plusieurs acteurs majeurs de l’industrie, via notamment sa structure Savvy Games Group.

Pour le PIF, EA représente une “cible-couronne” : un éditeur de jeux emblématique, porteur de titres historiques et de franchises aux revenus stables. L’opération pourrait offrir un levier pour développer plus loin le secteur du gaming, les services en ligne, l’e-sport, ou d’autres formes de divertissement interactif sur le long terme.

Malgré les assurances d’EA, le retrait du marché public et le passage sous contrôle quasi exclusif du PIF suscitent inquiétudes et doutes. Dans l’industrie, les rachats “leveraged buyout” sont souvent associés à des restructurations internes, des pressions accrues pour rentabiliser les vidéos, des reculs sur la qualité, ou des modifications de stratégie en fonction des objectifs financiers des investisseurs.

Pour l’instant, EA affirme qu’il n’est pas prévu de licenciements immédiats. Mais l’impact concret sur les jeux, les services, les studios acquis, et la liberté créative reste à observer. Certains observateurs pointent déjà le paradoxe : un contrôle quasi total d’un fonds souverain — souvent critiqué pour des raisons politiques — sur un éditeur qui touche des millions de joueurs à travers le monde.


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